Le dol : définition, conditions et sanctions (article 1137 du Code civil)

Le dol, l’erreur et la violence constituent, en droit des contrats, des vices de consentement conformément à l’article 1130 du Code civil.

Cependant, le dol se distingue des autres vices par sa nature intentionnelle et trompeuse.

Mais qu’est-ce qui distingue le dol des autres vices de consentement ? Comment est-il constitué et quelles sanctions son auteur encourt-il ?

C’est ce que nous allons aborder maintenant ! 😉

Sommaire

1. Le Dol définition

 

La définition du dol implique un comportement malhonnête qui conduit l’autre partie (le cocontractant) à conclure le contrat sur la base d’une information erronée, sans un consentement libre et éclairé.

L’article 1116 ancien du Code civil donnait cette définition du dol : « une cause de nullité de la convention lorsque les manœuvres pratiquées par l’une des parties sont telles, qu’il est évident que, sans ces manœuvres, l’autre partie n’aurait pas contracté ».

Désormais, depuis la réforme du droit des contrats par l’ordonnance du 10 février 2016, le dol est défini à l’article 1137 du Code civil : « le dol est le fait pour un contractant d’obtenir le consentement de l’autre par des manœuvres ou des mensonges.
 

Constitue également un dol la dissimulation intentionnelle par l’un des contractants d’une information dont il sait le caractère déterminant pour l’autre partie. »

Autrement dit, le dol consiste à vicier le consentement de son cocontractant en mettant en œuvre des pratiques trompeuses. Sans ces manœuvres, il n’aurait pas donné son consentement dans les mêmes conditions.

Exemple concret : Un vendeur d’un bien immobilier cache intentionnellement des défauts majeurs de la propriété (comme des problèmes d’humidité) en les dissimulant sous une couche de peinture fraîche pour tromper l’acheteur potentiel.

Mais comment prouver le dol ? 🤔

2. Les éléments constitutifs du dol

ÉlémentDescriptionExemples
Élément matérielManœuvresMises en scène ou stratagèmes visant à créer une fausse apparence de la réalité.
MensongesAffirmations fausses sur un élément du contrat. Exception : exagérations commerciales acceptables ne constituent pas un dol.
Réticence dolosiveSilence intentionnel sur une information cruciale qui aurait empêché l'autre partie de contracter en connaissance de cause.
Élément moralIntention de tromperMauvaise foi démontrée par la volonté délibérée de tromper l'autre partie.
Erreur déterminanteL'erreur induite par le dol doit être décisive, sans laquelle la victime n'aurait pas contracté.
Peu importe sur quoi porte le dol : le nature du contrat, son objet, son motif ou sa valeur. Il peut émaner du représentant, du gérant d’affaires du préposé, du porte-fort du contractant voire d’un tiers de connivence (article 1138 du Code civil).
Le dol est composé d’un élément matériel et d’un élément moral.
 

L’élément matériel

 

Tel que défini par l’article 1137 du Code civil, le dol est : « le fait pour un contractant d’obtenir le consentement de l’autre par des manœuvres, des mensonges ou la dissimulation intentionnelle par l’un des contractants d’une information dont il sait le caractère déterminant pour l’autre partie. »

L’élément matériel du dol peut ainsi désigner :

  • Les manœuvres : des mises en scène ou des stratagèmes qui visent à créer une fausse apparence de la réalité chez le cocontractant.
  • Les mensonges : un simple mensonge, même sans l’appui d’actes extérieurs, peut constituer un dol. Ainsi, le dol est caractérisé lorsque le cocontractant formule une affirmation fausse sur un élément du contrat.
Toutefois, le mensonge qui consiste en une simple exagération qui ne dépasse pas ce qui est habituellement admis dans les pratiques commerciales ne constitue pas un dol. (Cass. com. 13/12/1994)
 
  • La réticence dolosive : le dol peut être constitué par le silence d’une partie dissimulant au cocontractant un fait qui, s’il avait été connu de lui, l’aurait empêché de contracter. (Cass. 3ème civ. 15/01/1971)
La réticence dolosive consiste donc à taire une information cruciale pour le cocontractant qui ne peut plus conclure son contrat en toute connaissance de cause.
 
Mais peut-il y avoir réticence dolosive sans violation d’une obligation précontractuelle d’information du cocontractant ? 🧐
 
Pendant longtemps, la jurisprudence « Baldus » avait institué qu’une réticence dolosive ne pouvait subvenir qu’après la violation d’une obligation précontractuelle d’information. (Cass. 1ère civ. 03/05/2000)
 
Dans cet arrêt, la 1ère chambre civile de la Cour de cassation admettait que dans un contrat de vente, l’acquéreur non professionnel n’était pas tenu d’informer le vendeur sur la valeur du bien (son prix) et qu’en conséquence, aucune réticence dolosive ne pouvait être établie.
 
En d’autres termes, pas de réticence dolosive sans obligation précontractuelle d’information.
 
L’article 1137 du Code civil fut alors introduit par l’ordonnance et clarifia 2 points :
 

La réticence dolosive ne suppose plus l’existence d’une obligation précontractuelle d’information. La jurisprudence « Baldus » est ainsi remise en cause.

▶Toutefois, le silence du cocontractant sur son estimation de la valeur de la prestation ne constitue pas un dol (introduit par la loi de ratification du 20 avril 2018).
 

L’élément moral du dol


Le dol revêt également un aspect psychologique qui requiert 2 choses :

  • L’intention de tromper : le dol est un acte de déloyauté, il suppose la mauvaise foi, c’est-à-dire la volonté délibérée de tromper l’autre partie. La victime doit prouver que le mensonge ou la manœuvre était intentionnel.

Au contraire, un mensonge involontaire du cocontractant ne constitue pas un dol.

  • La création d’une erreur déterminante du consentement de la victime : qu’il s’agisse de manœuvres, d’un mensonge ou de réticence dolosive, l’erreur provoquée doit avoir un caractère déterminant du consentement de la victime. Autrement dit, sans cette erreur, la victime n’aurait pas accepté de conclure le contrat..
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3. Les sanctions liées au dol


La preuve du dol doit être apportée par la victime et ce, par tous moyens.

L’auteur du dol peut alors se voir opposer 2 sanctions :
 
  • La nullité du contrat : seule la victime peut agir en nullité du contrat.

On parle de nullité relative parce qu’elle a pour seul objet la sauvegarde d’un intérêt privé. Précisons que cette action en nullité du contrat doit être menée dans un délai de 5 ans à compter de la découverte du dol.

  • Le versement de dommages-intérêts : le dol constitue une faute qui peut être réparée par l’octroi de dommages-intérêts sur le fondement de l’article 1240 du Code civil. En effet, puisque l’auteur du dol a commis la faute avant de conclure le contrat, celui-ci engage sa responsabilité délictuelle et non contractuelle.
La victime du dol peut ainsi cumuler l’annulation du contrat et le versement d’une indemnisation mais peut aussi se contenter de cette seule indemnisation. (Cass. com. 15/01/2002)

4. Erreur et dol : quelle différence ?


Bien que l’erreur et le dol soient tous deux des vices du consentement, ils diffèrent par leur nature :

  • Dans l’hypothèse de l’erreur classique, dite erreur spontanée, un contractant s’est trompé seul sur le contrat. Au contraire, dans l’hypothèse du dol, dite erreur provoquée, le contractant a été trompé et induit en erreur.
  • Le dol relatif à la valeur de la prestation constitue une erreur excusable cause de nullité.
A contrario, l’erreur spontanée sur la valeur n’est pas susceptible de causer la nullité du contrat (article 1136 du Code civil). Il en va de même pour la réticence dolosive sur l’estimation de la valeur de la prestation qui n’est pas constitutive d’un dol.
 

Erreur spontanée sur la valeur :

  • Erreur spontanée signifie que vous vous trompez vous-même sur quelque chose, sans que quelqu’un d’autre vous ait influencé ou trompé.
  • Par exemple, si vous achetez un objet en pensant qu’il vaut plus cher qu’il ne vaut réellement, mais que personne ne vous a menti à ce sujet, c’est une erreur spontanée.
  • Selon l’article 1136 du Code civil, cette erreur ne suffit pas pour annuler le contrat. En d’autres termes, vous ne pouvez pas annuler un contrat simplement parce que vous vous êtes trompé sur la valeur de ce que vous achetez.

Réticence dolosive sur l’estimation de la valeur :

  • Réticence dolosive signifie qu’une personne garde intentionnellement le silence sur une information importante pour vous tromper.
  • Toutefois, si cette réticence porte uniquement sur l’estimation de la valeur d’une prestation ou d’un bien, cela ne constitue pas un dol.
  • Par exemple, si un vendeur sait qu’une œuvre d’art vaut moins que ce que vous croyez, mais ne vous corrige pas, ce silence ne suffit pas à annuler le contrat pour dol.

En résumé :

  • Si vous vous trompez vous-même sur la valeur d’un bien (erreur spontanée), cela ne vous permet pas d’annuler le contrat.
  • De même, si quelqu’un ne vous dit pas que vous surestimez la valeur d’un bien (réticence dolosive), cela n’est pas considéré comme une tromperie légale (dol) qui pourrait annuler le contrat.
ConceptDéfinitionNature de l'erreurConséquence
DolErreur provoquée intentionnellement par une partieErreur déterminanteNullité relative du contrat
ErreurErreur spontanée d'une partieErreur excusableNullité du contrat sous conditions

5. Dol et le vice caché : quelle différence ?


La différence entre dol et vice caché est importante dans la mesure où les conséquences juridiques ne sont pas du tout les mêmes.

Le vice caché est un défaut dont le propriétaire n’avait pas connaissance au moment de la vente du bien.

Au contraire, pour le dol, le propriétaire avait bien connaissance du problème et avait l’intention de tromper son acquéreur pour vendre le bien.

Le vice caché fait également l’objet d’une garantie des vices cachés qui a pour vocation de garantir l’acquéreur des défauts cachés du bien qu’il a acheté et qui le rendent impropre à l’usage destiné ou qui en diminuent grandement l’usage.

L’action pour vice caché doit être engagée dans un délai de 2 ans à compter de la découverte du vice caché (contre 5 ans pour le dol) ou dans un délai de 5 ans à compter de la vente.
 
Lorsque le vendeur est déclaré responsable des vices cachés, l’acquéreur peut opter entre :
  • La nullité du contrat de vente : pour le passé et l’avenir
  • La diminution de son prix : le calcul est alors déterminé par voie d’expertise. (article 1644 du Code civil)
S’il est avéré que le propriétaire était de mauvaise foi et qu’il avait connaissance des vices de la chose, il peut être condamné à verser des dommages et intérêts à la victime du dol. (article 1645 du Code civil)
ConceptDéfinitionDélai de recoursSanctions possibles
DolTromperie intentionnelle par le vendeur5 ans à compter de la découverte du dolNullité du contrat, dommages-intérêts
Vice cachéDéfaut inconnu du vendeur2 ans à compter de la découverte du viceRemboursement, réduction du prix
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