Responsabilité du fait d’autrui : article 1242 du Code civil

Responsabilité du fait d’autrui : article 1242 du Code civil

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Tel que prévu à l’article 1242 alinéa 1 du Code civil : « On est responsable, non seulement du dommage que l’on cause par son propre fait, mais encore de celui qui est causé par le fait des personnes dont on doit répondre, ou des choses que l’on a sous sa garde ».

Par cet article, le Code civil introduit la responsabilité du fait d’autrui.

Qu’est ce que la responsabilité du fait d’autrui ? Comment engager la responsabilité du fait d’autrui d’une personne ? Existe-t-il un principe général de responsabilité du fait d’autrui ?

C’est ce que tu vas découvrir de ce pas, c’est parti ! 🚀

Sommaire

1. Responsabilité du fait d’autrui : définition

 

L’origine de la responsabilité du fait d’autrui


La responsabilité du fait d’autrui
est l’obligation de réparer les dommages causés par les personnes dont on doit répondre.

Initialement, la responsabilité du fait d’autrui était cantonnée à une liste limitative énoncée à l’ancien article 1384 du Code civil. Seuls 3 régimes spéciaux étaient reconnus par le législateur :

  • La responsabilité des parents du fait de l’enfant mineur
  • La responsabilité des commettants du fait de leur préposé
  • La responsabilité des instituteurs du fait de leurs élèves

En dehors des hypothèses réservées aux parents, commettants et instituteurs, la responsabilité du fait d’autrui et l’article 1384 du Code civil étaient inapplicables.

Il faudra attendre l’arrêt « Blieck » du 23 mars 1991 pour que la Cour de cassation abandonne le caractère limitatif de l’article 1384 du Code civil.

Arrêt Blieck : la reconnaissance de nouveaux cas de responsabilité du fait d’autrui


En l’espèce, M. Blieck est placé dans un centre éducatif spécialisé en raison de troubles mentaux. Toutefois, celui-ci échappe à la surveillance des encadrants de l’association et déclenche un incendie dans une forêt à proximité.

Les propriétaires du domaine abritant la forêt demandent réparation à l’association en charge de M. Blieck, auteur de l’incendie, sur le fondement de l’article 1384 du Code civil.

Alors que l’association invoque le caractère limitatif du texte en guise de défense, la Cour d’appel de Limoges admet que la responsabilité du fait d’autrui n’est pas limitée aux seuls cas prévus par la loi. L’association forme donc un pourvoi en cassation.

Par un arrêt « Blieck », la Cour de cassation rejoint la position de la Cour d’appel et relève 3 critères : l’association avait la charge d’organiser et de contrôler le mode de vie de cet handicapé et ce, à titre permanent. Le centre est donc responsable de l’incendie déclaré par M. Blieck.

En d’autres termes, la Cour de cassation reconnait une responsabilité du fait d’autrui en dehors des régimes spéciaux sans l’ériger en principe général comme elle l’avait fait pour la responsabilité du fait des choses avec l’arrêt « Jand’heur » et l’arrêt « Franck ».

Maintenant que tu es au clair sur l’historique de la responsabilité du fait d’autrui, je te propose d’étudier en détail les 3 régimes spéciaux d’origine et l’émergence des nouveaux cas suite à l’arrêt « Blieck » 😉

2. Responsabilité des parents du fait de l’enfant mineur


Quel est le 1er cas de responsabilité du fait d’autrui ?
🧐

Prévue à l’article 1242 alinéa 4 du Code civil, la responsabilité des parents du fait de l’enfant mineur implique que les pères et mères, en tant qu’ils exercent l’autorité parentale, sont solidairement responsables du dommage causé par leur enfant mineur habitant avec eux.

La responsabilité des parents du fait de leurs enfants est une responsabilité de plein droit qui suppose la réunion de 3 conditions :

  • L’enfant doit être mineur : dès que l’enfant atteint la majorité ou est émancipé, les parents ne sont plus responsables des dommages qu’il a causés. La minorité s’apprécie au moment de la réalisation de l’acte.

  • Les parents doivent exercer l’autorité parentale : seuls les parents ont l’autorité parentale, sous réserve d’une délégation parentale ou d’une déchéance.

La Cour de cassation s’oppose strictement à ce que l’autorité parentale soit exercée par d’autres personnes que les parents. Par exemple, elle l’a refusée aux grands parents qui avaient élevé leur petit fils depuis sa naissance. (Cass. crim. 08/02/2005)

En cas de séparation des parents, peu importe où se trouve l’enfant au moment de la réalisation du dommage, est responsable le parent qui en a la garde. (Cass. crim. 28/06/2000)

  • L’enfant a commis un fait à l’origine du dommage : le simple fait causal de l’enfant suffit à engager la responsabilité parentale, la faute et le discernement de l’enfant ne sont plus exigés. ( 2ème civ. « Levert» 10/05/2001)

Lorsque ces 3 conditions sont réunies, les parents engagent leur responsabilité du fait d’autrui et ne peuvent pas s’exonérer en démontrant leur absence de faute. Seule la faute de la victime et la force majeure pourront justifier une exonération partielle ou totale des parents. (Cass. 2ème civ. « Bertrand » 19/02/1997)

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3. Responsabilité des commettants du fait de leur préposé


Quel est le 2ème cas de responsabilité du fait d’autrui ?
🤠

Prévue à l’article 1242 alinéa 5 du Code civil, la responsabilité des commettants du fait de leur préposé instaure que les maîtres et commettants sont responsables des dommages causés par leurs domestiques et préposés dans les fonctions auxquelles ils sont employés.

La responsabilité des commettants du fait de leur préposé est une responsabilité de plein droit qui suppose la réunion de 2 conditions :

  • Un lien de préposition : il s’agit d’un lien de subordination entre celui qui donne les ordres et celui qui les reçoit et les exécute. Si cette hypothèse apparait spécifique au cadre d’un contrat de travail, elle peut également naître dans le cadre de relations familiales ou amicales.

Le pouvoir de donner des ordres ou des instructions suffit à constituer le lien de préposition, même si le commettant n’a aucune compétence.

  • Un dommage dans l’exercice de ses fonctions : le commettant n’est responsable que si le préposé a commis le dommage dans le cadre de ses fonctions.

Quand est ce que le dommage rentre dans l’exercice des fonctions ?

Il faut distinguer 3 hypothèses :

  • 1ère hypothèse : le fait dommageable commis au temps et lieu de travail pour les fonctions dans lesquelles il est employé. La responsabilité du commettant est retenue.
  • 2ème hypothèse : le dommage causé sans aucun lien avec les fonctions, en dehors du temps et lieu de travail. Ici, la responsabilité du commettant ne peut pas être retenue.
  • 3ème hypothèse : l’acte ne rentre pas dans le cadre de l’accomplissement normal de la fonction mais la fonction a facilité voire provoqué le dommage. Ex : l’emprunt de la voiture de fonction pendant un week-end cause un accident.

Dans cette dernière situation, le commettant s’exonère de sa responsabilité si son préposé a commis un abus de fonction en agissant : hors des fonctions auxquelles il est employé, sans autorisation et à des fins étrangères à ses attributions. (Cass. ass. plén. 19/05/1988)

En dehors de l’abus de fonction, le préposé jouit d’une immunité et la victime ne peut pas agir civilement pour faute contre lui. Toutefois, cette immunité tombe si, sans aller jusqu’à commettre un abus de fonction, le préposé a excédé les limites de ses fonctions. (Cass. ass. plén. « Costedoat » 25/02/2000)

Le commettant et son préposé sont alors responsables in solidum sur le fondement de la responsabilité du fait d’autrui.

4. Responsabilité des instituteurs du fait de leurs élèves


Quel est le 3ème cas de responsabilité du fait d’autrui ?
😎

Instituée par l’article 1242 alinéa 6 du Code civil, la responsabilité des instituteurs du fait de leurs élèves prévoit que tous les membres de l’enseignement, instituteurs ou non, sont responsables des dommages causés par les élèves placés sous leur surveillance.

Par membre de l’enseignement, il faut aussi entendre les surveillants, le chef d’établissement, le CPE, etc.

Une exception : la responsabilité du fait d’autrui des enseignants du supérieur est exclue puisqu’ils n’ont en principe pas de mission de surveillance.

Par exemple, si tu envisages de mettre le feu à ton amphi pour écourter cet interminable cours de droit administratif, n’espère pas t’en tirer en invoquant la responsabilité de ton prof de droit ! 😂

À l’origine, la responsabilité des instituteurs était fondée sur une présomption de faute, si l’enfant avait causé un dommage, c’est nécessairement que l’enseignant l’avait mal surveillé à moins qu’il ne démontre le contraire.

Ce régime étant jugé trop strict pour les professeurs, la loi du 5 avril 1937 est venue modifier 2 choses :

  • La présomption de faute est supprimée : désormais, une faute de négligence ou d’imprudence de l’instituteur doit être prouvée par la victime. L’appréciation de cette obligation de surveillance varie en fonction de l’âge des élèves et de la dangerosité de l’activité.

  • La responsabilité de l’État est substituée à celle des instituteurs : lorsque la responsabilité d’un instituteur est retenue, seule la responsabilité de l’État peut être mise en cause par la victime, c’est l’État qui en assume les conséquences financières. Cette substitution vaut pour les enseignants du secteur public mais aussi pour ceux du secteur privé dont l’établissement a conclu un contrat d’association avec l’État.

Au final, avec cette exigence de la démonstration d’une faute de l’enseignant par la victime, la responsabilité des instituteurs du fait de leurs élèves se rapproche davantage de la responsabilité du fait personnel de l’article 1240 du Code civil.

5. Émergence de nouveaux cas de responsabilité du fait d’autrui


Quels sont les nouveaux cas de responsabilité du fait d’autrui ?
🤔

Au-delà des 3 régimes spéciaux qui tirent leur fondement à l’article 1242 du Code civil, la jurisprudence Blieck a ouvert la voie à de nouveaux cas de responsabilité du fait d’autrui :

  • D’une part, la responsabilité de ceux qui gouvernent le mode de vie d’autrui.
  • D’autre part, la responsabilité de ceux qui encadrent l’activité d’autrui.

La responsabilité de ceux qui gouvernent le mode de vie d’autrui


Les personnes physiques ou morales qui exercent un pouvoir juridique d’organisation et de contrôle du mode de vie du gardé et ce, de manière permanente, sont responsables des dommages qu’il cause.

Ex : un foyer éducatif, une association en charge de personnes handicapées comme dans l’arrêt Blieck, etc.

Le gardé s’entend d’une personne vulnérable qui nécessite une surveillance particulière telle qu’un mineur en difficulté ou un majeur protégé. 

La responsabilité de ceux qui encadrent l’activité d’autrui


Par deux arrêts du 22 mai 1995, la Cour de cassation a étendu la responsabilité du fait d’autrui aux associations sportives qui ont pour mission d’organiser, de diriger et de contrôler l’activité de leurs membres au cours des compétitions auxquelles elles participent.

Ainsi, les associations sportives professionnelles comme amateurs sont responsables des dommages causés par leurs joueurs pendant les compétitions et même lors des entrainements.

La Cour de cassation a précisé que la responsabilité de l’association peut être engagée sans que le membre à l’origine du dommage ne soit personnellement identifié. (Cass. 2ème civ. 21/10/2004)

En revanche, la responsabilité du fait d’autrui sera, le plus souvent, écartée si le dommage est causé par un membre d’une association de chasse, celles-ci n’ayant que très rarement la charge d’organiser, de diriger et de contrôler l’activité de leurs membres. (Cass. 2ème civ. 11/09/2008)

En définitive, si à l’article 121-1 du Code pénal, la matière pénale énonce que « nul n’est responsable pénalement que de son propre fait », la matière civile et sa responsabilité du fait d’autrui entendent bien trouver un responsable pour que la victime obtienne réparation.

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