En 1928, Demogue établit une distinction considérée comme la summa divisio du droit des obligations, il différencie obligation de moyen et obligation de résultat.
L’objectif est d’appréhender la réalité des situations juridiques et ainsi d’infliger au débiteur un traitement adapté à ce pour quoi il s’est engagé.
Sommaire
1. Obligation de moyen : définition
Qu’est ce qu’une obligation de moyens et dans quels cas trouve-t-elle à s’appliquer ? 🧐
Le débiteur s’engage à déployer ses meilleurs efforts pour exécuter l’obligation, mais il ne peut être tenu responsable de l’échec si toutes les diligences raisonnables ont été accomplies.
En gros, il doit faire « de son mieux ».
Cette obligation de moyens se transforme en obligation de résultat pour le dépositaire hôtelier ou aubergiste qui doit conserver les biens de ses clients.
Ainsi, le médecin s’engage à prodiguer à son patient tous les soins nécessaires à sa guérison, mais il ne peut pas voir sa responsabilité engagée du seul fait de la non-guérison du malade.
De même pour l’avocat qui est tenu de se livrer à une étude approfondie du dossier, de conseiller et de défendre son client de façon convaincante, mais pas de gagner impérativement le procès. Tu imagines la galère sinon ! 😵
Par exemple, l’article L6421-4 du Code des transports dispose que la responsabilité du transporteur aérien qui effectue un transport gratuit « ne sera engagée que s’il est établi que le dommage a pour cause une faute imputable au transporteur ou à ses préposés ».
Néanmoins, la Cour de cassation a rappelé dans un arrêt que ce critère de la gratuité n’est pas absolu. (Cass. 1ère civ. 05/07/2012) La donation fait bel et bien peser sur le donateur une obligation de résultat.
▶ Les obligations accessoires de sécurité : considérée au départ comme une obligation de résultat, l’obligation de sécurité s’est finalement vue reléguée au rang d’obligation de moyen et ce, dès lors que la participation active du contractant à l’exécution de l’obligation compte parmi les circonstances du dommage.
Il s’agit de la théorie de l’acceptation des risques qui intéresse notamment le domaine sportif.
Type d'obligation | Exemple | Responsabilité | Preuve |
---|---|---|---|
Obligation de moyen | Soins prodigués par un médecin | Responsabilité engagée si absence de diligence raisonnable | Le créancier doit prouver la négligence du débiteur |
Obligation de moyen renforcée | Réparation effectuée par un garagiste | Responsabilité présumée sauf preuve contraire | Le débiteur doit prouver qu’il a agi sans faute |
Mais quelle est la différence entre obligation de moyen et obligation de résultat ? 🤔
2. Obligation de moyen et obligation de résultat : quelle différence ?
Quel critère détermine si l’obligation est de résultat ou de moyen ?
Par l’obligation de résultat, le prestataire ne s’engage pas seulement à faire de son mieux pour atteindre le résultat escompté, il s’engage à procurer au créancier un résultat précis, concret et déterminé dès l’origine.
À l’inverse de l’obligation de moyens, les moyens mis en œuvre par le débiteur pour atteindre le résultat ne sont pas pris en considération, seul le résultat compte.
L’obligation de résultat est plus stricte, elle ne laisse pas de place au doute, à l’aléa. Le débiteur a la maîtrise des choses, des évènements ou des personnes qui sont confiées sous sa garde.
Ainsi, sont des obligations de résultat : les obligations de ne pas faire, l’obligation de payer le prix de la chose dans la plupart des contrats de vente, le transfert de propriété d’un bien ou la restitution de la chose empruntée, etc.
Bien entendu, la rigueur de l’obligation de résultat n’est justifiée que si l’exécution de l’obligation du prestataire est possible, le résultat escompté doit être suffisamment certain.
A contrario, ce même sportif obéit à un programme d’entrainement physique, il se soumet à des contrôles médicaux et respecte une certaine hygiène de vie, ces astreintes sont des obligations de résultat.
Critère | Obligation de moyen | Obligation de résultat |
---|---|---|
Nature de l'engagement | Déployer tous les moyens pour atteindre le résultat | Garantir l'atteinte d'un résultat précis |
Responsabilité | Engagée en cas de manque de diligence | Engagée automatiquement si le résultat n’est pas atteint |
Preuve | Le créancier doit prouver la faute ou la négligence | Le créancier doit prouver que le résultat n’a pas été atteint |
Exemples | Soins médicaux, défense juridique | Livraison de biens, paiement d'une somme d'argent |
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3. Obligation de moyen renforcée : définition
Qu’est-ce qu’une obligation de moyen renforcée dans tout ça ? 😁
L’obligation de moyen renforcée, également appelée obligation de résultat atténuée, est une catégorie alternative mise en place par la jurisprudence.
L’idée est de permettre au débiteur d’une obligation de résultat de s’exonérer de sa responsabilité en démontrant qu’il a exécuté son obligation sans commettre de faute. Il renverse la présomption de responsabilité.
Quelques exemples tirés de la loi et de la jurisprudence :
▶En matière de location d’immeuble, le preneur « répond des dégradations ou des pertes qui arrivent pendant sa jouissance, à moins qu’il ne prouve qu’elles ont eu lieu sans sa faute » (article 1732 du Code civil).
▶L’obligation de réparation du garagiste, et plus largement de tous les professionnels accomplissant une prestation de réparation, est une obligation de moyens renforcée. (Cass. 1ère civ. 02/02/1994)
Situation | Exemple | Nature de l'obligation | Preuve requise |
---|---|---|---|
Location d'immeuble | Locataire responsable des dégradations | Obligation de moyen renforcée | Locataire doit prouver que les dégradations ne sont pas de sa faute |
Réparation par un garagiste | Obligation de réparer le véhicule | Obligation de moyen renforcée | Garagiste doit prouver qu'il a tout fait correctement |
Transport maritime | Transporteur responsable des passagers | Obligation de moyen renforcée | Transporteur doit prouver que l’accident n’est pas de sa faute |
4. Intérêt de la distinction entre ces obligations
S’agissant du droit commun de la preuve, l’article 1353 du Code civil nous enseigne deux choses :
- Celui qui réclame l’exécution d’une obligation doit la prouver et
- Celui qui se prétend libéré doit justifier le fait qui a produit l’extinction de l’obligation.
Preuve de l’inexécution de l’obligation de moyen
En matière d’obligation de moyens, le créancier ne peut pas se contenter de prouver l’absence de résultat pour obtenir réparation, le débiteur n’avait pas promis de résultat.
Le créancier doit démontrer la faute du débiteur en appréciant son comportement, sa négligence et en établissant qu’il ne s’est pas comporté avec toute la diligence nécessaire à l’exécution de l’obligation.
Sous la rédaction de l’article 1137 ancien du Code civil, le comportement du débiteur d’une obligation de moyens s’appréciait au cas par cas (in abstracto) par analogie avec le comportement du « bon père de famille ».
Désormais, il convient de se référer à l’article 1197 du Code civil ainsi rédigé : « L’obligation de délivrer la chose emporte obligation de la conserver jusqu’à la délivrance, en y apportant tous les soins d’une personne raisonnable ».
Preuve de l’inexécution de l’obligation de résultat
En cas d’inexécution d’une obligation de résultat, le créancier n’a plus à prouver la faute du débiteur. Le raisonnement se fait en 2 temps :
- Le créancier établit que le contrat comportait tel engagement déterminé à son profit.
- Le créancier démontre que cet engagement n’a pas été tenu et donc que le débiteur, sur qui pèse une présomption défavorable, n’a pas exécuté son obligation.
Néanmoins, la Cour de cassation a précisé dans un arrêt que « la responsabilité de plein droit du débiteur ne s’étend qu’aux dommages causés par le manquement à son obligation de résultat ». (Cass. 1ère civ. 14/03/1995)
Le créancier doit ainsi démontrer que le dommage tire son origine du manquement à la prestation, le débiteur n’est pas responsable des dommages à l’origine inconnue.
L’article 1231-1 du Code civil indique que le débiteur peut se libérer en apportant la preuve que l’inexécution provient d’une cause étrangère telle que la force majeure ou le fait de la victime (le créancier).
La Cour de cassation a ainsi jugé que « la faute de la victime, qui vient en concours avec l’exécution par le débiteur d’une obligation de résultat dans la production du dommage peut partiellement exonérer le débiteur ». (Cass. com. 01/03/2005)
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