Mais historiquement, on s’appuyait davantage sur des répétitions successives et concomitantes pour mémoriser une information, sans laisser le cerveau se reposer. C’est ce qu’on appelle l’apprentissage massif qui n’a rien d’optimisé.
Tout va changer avec les travaux d’Hermann Ebbinghaus (1850-1909), philosophe allemand considéré comme le père de la psychologie expérimentale.
Pendant ses recherches, Ebbinghaus n’a cessé d’apprendre des listes de logatomes ou de paralogues. C’est à dire des syllabes constituées de 3 ou 4 lettres et la plupart du temps sans signification particulière.
Il en faisait des listes de différentes longueurs, il comptait le nombre de répétitions et le temps qu’il lui fallait pour les connaître par cœur.
Un jour, il choisit une longue liste qu’il répéta jusqu’à la savoir par cœur. Il lui fallut 68 répétitions successives, on était dans un contexte d’apprentissage massif.
C’est alors qu’il a une idée incongrue et totalement révolutionnaire : espacer les répétitions 🎯
Il prit une liste de même longueur mais changea son mode opératoire.
Le premier jour, il ne la répéta que 18 fois, c’était insuffisant pour la connaître par cœur. Il réitéra dès le lendemain en répétant sa liste 12 fois. Et encore 8 fois le surlendemain.
Et cette fois-ci, il fut capable de réciter sa liste entièrement et même deux fois de suite sans aucune erreur. Cette fois, il n’avait eu besoin que de 38 répétitions au total pour retenir sa liste.
En choisissant d’espacer ses répétitions, il avait réduit le nombre de répétitions nécessaires de 44%, pour obtenir un résultat identique : le principe des répétitions espacées était né !🚀
Ebbinghaus poursuivit ses recherches pendant 3 ans, il étudia ses pourcentages d’exactitude après quelques heures, quelques jours voire quelques semaines.
Et finalement, ses recherches aboutirent à deux conclusions très importantes :
• L’apprentissage distribué est plus efficace et moins coûteux en énergie que l’apprentissage massif.
• Chaque répétition apporte une rémanence de la mémorisation plus importante que la répétition précédente.
En d’autres termes, à chaque répétition, les circuits concernés restent plus longtemps en veille, qu’à la répétition précédente.
Ainsi, il est possible d’augmenter au fur et à mesure le temps entre chaque nouvelle répétition sans perdre en efficacité.
La répétition est la clé d’un apprentissage durable, global et intégré.
Imagine que tu construises des routes pour relier plusieurs villes.Lorsque de nouvelles connexions sont établies, répéter et réviser l’information va renforcer ces connexions neuronales et ancrer l’information dans ta mémoire à long terme.
C’est là qu’entre en scène la myéline : un composant biologique qui protège tes connexions synaptiques et qui est en relation directe avec tes performances.
En fait, à chaque fois que le circuit neuronal est emprunté, le manteau de myéline s’épaissit. Et en s’épaississant, la couche de myéline va faciliter la circulation du flux nerveux le long de la connexion.
En d’autres termes, à chaque répétition, tu vas consolider la route empruntée par l’information. Petit à petit, tes petites routes de campagne peu praticables vont se transformer en véritables 4 voies 🚘
En début d’apprentissage, l’effort mobilise toutes les ressources du cortex frontal. Afin de libérer l’esprit pour d’autres tâches, il est indispensable que la connaissance devienne routinière (c’est pas pour rien que je te parle de route depuis tout à l’heure 😂).
Grâce à la répétition, tu auras accès à l’information :
• Plus rapidement : ça va diminuer ta charge cognitive.
• Et plus longtemps : histoire de pas oublier les notions après le partiel.
La répétition est donc une chose essentielle dans tes études de droit.
Comme l’a si bien affirmé Montaigne : « La répétition est le burin de la mémoire ».
Lorsque tu vois une information à une seule reprise, elle ne se stockera pas automatiquement dans ta mémoire d’autant plus si cette information est nouvelle.
Croire que tu connais ton cours en l’ayant lu une fois ou en ayant écouté le professeur constitue donc une erreur fondamentale ⛔
De plus en plus de chercheurs observent les effets physiologiques de la répétition sur le cerveau.Ils avaient déjà remarqué, chez les chauffeurs de taxi londoniens, que l’hippocampe (la structure du cerveau qui est utilisé dans la mémorisation et la navigation spatiale) était plus grand chez eux que dans le reste de la population en raison des trajets souvent répétés et de leur travail consistant à connaître par cœur la capitale anglaise.
D’autres chercheurs de l’Université McGill au Canada ont voulu voir si cet effet était reproduisible grâce du jeu vidéo. 28 personnes furent recrutées pour jouer à un jeu de course pendant 45 min mais dans des conditions différentes.
Le premier groupe allait tester 20 circuits différents pendant leur temps de jeu. Le second groupe ne devrait, quant à lui, jouer que sur un unique circuit, 20 fois d’affilée.
Après cette période de jeu, les connaissances spatiales des deux groupes furent testées. Le second groupe avait alors bien plus de facilité à augmenter sa vitesse quand il le fallait, à classer des photos de paysage et à tracer une carte de la route.
Grâce à la répétition, le second groupe avait assimilé les fonctionnements du circuit, alors qu’il ne s’agissait que d’un univers 3D.
Encore plus étonnant, les chercheurs ont observé chez le second groupe des changements notables de la taille de l’hippocampe et de la synchronicité entre celui-ci avec le reste des parties du cerveau liées à la mémoire spatiale.
La répétition a donc un véritable impact sur la structure même de notre cerveau.
Toutefois, elle présente un inconvénient majeur : la répétition, c’est chiant.