Arrêt Huard – 3 novembre 1992 : fiche d’arrêt et portée

Arrêt Huard – 3 novembre 1992 : fiche d’arrêt et portée

L’arrêt Huard rendu par la Cour de cassation le 3 novembre 1992 est venu apporter quelques éclaircissements dans le débat de la doctrine avec la jurisprudence au sujet de la révision d’un contrat.

Cet arrêt fait partie de la thématique de la théorie de l’imprévision. La théorie se base sur un sujet simple : doit-on permettre au juge la révision d’un contrat qui serait déséquilibré par un changement imprévisible des circonstances en dehors de toute habilitation législative ?

La doctrine tend à vouloir autoriser cette révision pour plusieurs raisons. Par exemple, l’exécution de bonne foi des obligations des parties justifie cette révision.

Un contrat est la rencontre d’intérêts communs entre plusieurs contractants, il est normal que la révision soit applicable lorsque des changements « inattendus» ont bouleversé ces intérêts.

C’est ce que défend Josserand : il faut tendre vers les circonstances économiques qui existaient au moment de la conclusion du contrat.

De plus, ces circonstances sont parfois la raison pour laquelle  les parties se sont engagées l’une envers l’autre. Il paraît donc absurde de n’opérer aucun changement lorsqu’elles ont été modifiées de manière imprévisible.

Néanmoins la Cour de cassation s’est longtemps opposée à cette théorie de l’imprévision en raison de la force obligatoire du contrat. En effet, la valeur du contrat réside dans la parole donnée au moment sa conclusion.

De plus, le contrat ne concerne que les parties signataires. Le juge ne peut pas se substituer à la volonté de celles-ci.

Dans ce cadre,  L’arrêt Huard apporte-t-il une solution au débat sur la théorie de l’imprévision ? Quelle est la portée de l’arrêt Huard ?

Je vais vous expliquer tout ça ! Suivez le guide !🚀

Sommaire

1. Arrêt Huard : fiche d’arrêt


Comment s’est déroulée l’affaire de l’arrêt Huard
?  🧐

Les faits

 

En l’espèce, Une société pétrolière conclu un contrat avec un distributeur de carburant : Monsieur Huard.

Alors que jusqu’en en 1982, les produits pétroliers voyaient leurs prix fixés par les pouvoirs publics, différents arrêtés ont été pris entre 1982 et 1983,  ce qui a permis aux distributeurs de consentir des rabais sur le prix plancher des produits pétroliers fixé par les pouvoirs publics.

Suite à l’émergence d’une grande concurrence, la société pétrolière proposa à M. Huard un statut particulier, qui impliquerait une fixation des prix du carburant par celle-ci, afin de résister à cette concurrence.

M. Huard refusa, ce qui n’a pas empêché la baisse de ses ventes.

 

La procédure

 

Ce dernier assigna alors la société pétrolière en justice selon le motif que celle-ci a refusé de baisser le prix du carburant, l’empêchant ainsi d’exercer des prix concurrentiels.

L’arrêt rendu par la Cour d’appel répond positivement à la requête de Monsieur Huard en lui accordant des dommages et intérêts alors selon le motif que la société pétrolière n’a pas respecté son obligation de bonne foi.

En effet, la Cour justifie son propos en relevant que le prix fixé par la société était supérieur au prix proposé au consommateur final par les distributeurs.

La société pétrolière se pourvoi en cassation.

Les circonstances économiques ayant changées de manière imprévue, l’obligation de bonne foi contractuelle oblige-t-elle à un contractant la renégociation d’un contrat afin de permettre sa mise en œuvre équitable ?

 

La solution de la Cour de cassation

 

La Cour de cassation rend un arrêt de rejet. En effet, elle donne raison à la Cour d’appel en relevant l’absence de clause contractuelle permettant l’exécution de bonne foi du contrat. La société pétrolière aurait dû renégocier le contrat au vue d’un changement des circonstances économiques.

La Cour relève donc la faute contractuelle de la société de ne pas avoir renégocier le contrat suite au changement des circonstances économiques imprévisibles. Elle rend donc une décision qui va à l’encontre de ce qu’elle a pu déclarer auparavant (Cour de cassation, Canal de Craponne, 6 mars 1876).

Néanmoins, même s’il s’agit d’un arrêt qui s’inscrit dans une logique d’assouplissement de la jurisprudence afin de rendre l’exécution du contrat plus équitable, il faut relever que le débat avec la doctrine n’est toujours pas résolu.

En effet, la Cour de cassation ne déclare en aucun cas que le juge puisse réviser les termes du contrat. A minima, elle reconnaît l’obligation de révision basée sur l’obligation de bonne foi.

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2. Arrêt Huard : sa portée


Quelle est la portée de l’arrêt Huard ?
🤔

Au final, cet arrêt n’apporte aucune solution concrète au débat sur la théorie de l’imprévision. La Cour n’exprime pas de reconnaissance pour le juge de réviser le contrat lors d’un changement de circonstance imprévue.

La Cour de cassation relève seulement le manque de l’obligation de bonne foi de l’une des parties qui aurait dû renégocier le contrat en vue de son exécution équitable.

En effet, les circonstances économiques ayant changées, chaque partie était tenue de s’assurer de la bonne exécution du contrat dans un cadre équivalent à celui dans lequel elles avaient initialement accordées leurs volontés.

Dans ce cadre, en manquant à son obligation de bonne foi, la Cour est venue sanctionner le cocontractant qui refusait l’adaptation des termes du contrat, ce qui avait créé un déséquilibre.

Par ailleurs, la Cour de cassation a rendu un arrêt sensiblement similaire en parlant « d’obligation de loyauté » (Cour de cassation, Chevassus-marche, 24 novembre 1998)

Aujourd’hui, la réforme du droit des contrats opérée par l’ordonnance du 10 février 2016 a consacré cette théorie de l’imprévision à l’article 1195 du Code civil qui dispose que : « Si un changement de circonstances imprévisible lors de la conclusion du contrat rend l’exécution excessivement onéreuse pour une partie qui n’avait pas accepté d’en assumer le risque, celle-ci peut demander une renégociation du contrat à son cocontractant. Elle continue à exécuter ses obligations durant la renégociation ;

En cas de refus ou d’échec de la renégociation, les parties peuvent convenir de la résolution du contrat, à la date et aux conditions qu’elles déterminent, ou demander d’un commun accord au juge de procéder à son adaptation. A défaut d’accord dans un délai raisonnable, le juge peut, à la demande d’une partie, réviser le contrat ou y mettre fin, à la date et aux conditions qu’il fixe ».

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