L’arrêt dame Lamotte du Conseil d’État rendu le 17 février 1950 révèle un principe général du droit qui affirme la possibilité d’exercer un recours pour excès de pouvoir en toute circonstance à l’encontre d’une décision administrative.
Le recours pour excès de pouvoir revêt un caractère d’ordre public et doit rester ouvert dès lors qu’il y a un contentieux avec l’administration.
L’accès permanent au recours pour excès de pouvoir est-il un principe général du droit administratif ? Quelle est la portée de l’arrêt dame Lamotte ?
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Sommaire
1. Arrêt dame Lamotte : fiche d’arrêt
Comment s’est déroulée l’affaire dame Lamotte ? 🧐
Les faits
En l’espèce, dans un objectif de mise en culture immédiate, une loi du 27 août 1940 avait autorisé les préfets à concéder à des tiers des exploitations non cultivées. La condition de la cession de ces exploitations était qu’elles devaient être abandonnées depuis plus de deux ans.
En vertu de cette loi, le préfet de l’Ain a pris deux arrêtés de concession des terres de la dame Lamotte.
Cependant, le Conseil d’État annule ces arrêtés préfectoraux selon le motif que les terres concédées n’ont pas été abandonnées depuis plus de deux ans, ce qui était une condition pour cette cession exceptionnelle.
Malgré l’annulation de deux arrêtés consécutifs, le préfet de l’Ain pris de nouveau un arrêté afin de concéder les terres de la dame Lamotte.
La procédure
Cette fois-ci, les choses se compliquent. C’est dame Lamotte qui, par une réclamation devant le conseil de préfecture, a voulu annuler cet arrêté.
Le Conseil de préfecture a pris alors un arrêté pour annuler l’arrêté du Préfet de l’Ain.
Cependant, le Ministre de l’agriculture réclame au Conseil d’État l’annulation de l’arrêté du conseil de la préfecture selon le motif qu’une loi du 23 mai 1943 dispose que « l’octroi d’une concession ne peut faire l’objet d’aucun recours administratif ».
Plus simplement, le recours de la dame Lamotte n’était pas ouvert selon cette loi, le Ministre a donc voulu annuler la démarche de dame Lamotte sur ce fondement où aucun recours n’est possible.
Au regard de la situation et de cette loi empêchant dame Lamotte d’agir, une norme législative peut-elle faire obstacle à l’exercice d’un recours pour excès de pouvoir à l’encontre d’une décision administrative ?
La solution du Conseil d’État
Le Conseil d’État répond alors qu’il existe un principe général du droit selon lequel, le recours pour excès de pouvoir est ouvert dès lors qu’il y a une décision administrative.
Pourtant, le fondement de la loi du 23 mai 1943 soulevé par le Ministre dispose que, lors de l’octroi d’une concession, les recours administratifs et judiciaires sont exclus.
Par conséquent, pourquoi le Conseil d’État ne relève pas que le recours de dame Lamotte est irrecevable en vertu de ladite loi ?
Dans ce cas précis, le Conseil relève que la loi du 23 mai 1943 n’a pas explicitement exclu le recours pour excès de pouvoir.
Autrement dit, le recours pour excès de pouvoir « est ouvert même sans texte contre tout acte administratif, et qui a pour effet d’assurer, conformément aux principes généraux du droit, le respect de la légalité ».
Le Conseil d’État, statuant maintenant comme juge de l’excès de pouvoir, a procédé au contrôle de légalité du dernier arrêté préfectoral du préfet de l’Ain afin de savoir s’il est illégal et, le cas échéant, l’annuler.
En l’espèce, il avait eu connaissance de la position du Conseil d’État sur ces deux précédentes annulations de ses arrêtés. Dès lors, force est de constater qu’il avait délibérément fait obstacle à une décision du Conseil d’État en prenant cet ultime arrêté.
L’acte administratif pris par le préfet de l’Ain visant à concéder les terres de la dame Lamotte est donc entaché de détournement de pouvoir. L’acte administratif est donc illégal.
Finalement, le dernier arrêté pris par le Préfet de l’Ain a été annulé et le Conseil d’État donne raison à dame Lamotte.
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2. Arrêt dame Lamotte : sa portée
Quelle est la portée de l’arrêt dame Lamotte ? 🤔
C’est un arrêt fondateur en droit administratif. C’est un arrêt de principe qui dégage un principe général de droit : l’ouverture en toute circonstance d’un recours pour excès de pouvoir à l’encontre d’une décision administrative.
Cette jurisprudence souligne l’importance du recours pour excès de pouvoir, instrument du contrôle de la légalité d’un acte administratif.
Sa primauté est telle que même en présence d’une norme législative qui dispose qu’aucun recours n’est possible, le fait que soit visé un acte administratif suffit à rendre valide le recours pour excès de pouvoir.
C’est ce qu’affirme le Conseil d’État dans cet arrêt en déclarant la recevabilité du recours pour excès de pouvoir malgré la présence de cette loi sur l’octroi de concession.
En effet, ce recours est ouvert même en l’absence de texte. La présence d’un contentieux avec l’administration prenant un acte administratif potentiellement illégal est suffisant.
Dans ce cadre, le justiciable doit avoir un intérêt à agir et intervenir dans un délai de 2 mois à compter de la notification ou de la publication de la décision administrative (Article R421-1 et suivants du Code de justice administrative).
Cette nécessité de laisser ouvert le recours pour excès de pouvoir se justifie par les droits et libertés fondamentales qu’il protège.
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